Tag: Amelodine

  • 116 – Les avions

    Phrase donnée par Amelodine

    Il était une fois, un petit garçon qui avait peur des avions.

    Depuis qu’il était capable de lever les yeux au ciel, il se mettait à pleurer qu’il voyait ces objets inertes mais mouvants dans les airs. Car c’était bien les avions et pas n’importe quelle chose qui vole qui lui inspirait ce sentiment étrange d’appréhension. Les oiseaux le faisaient sourire.

    Dès qu’il eut l’âge de marcher — cette phobie ne le quittait pas—, il allait se cacher entre les jambes de son parent le plus proche.

    À l’âge de parler, ses parents lui demandèrent pourquoi il avait peur et il répondit qu’il n’aimait pas ces objets qui traversaient le ciel sans faire de mouvement et qui laissaient des traces blanches derrière eux. Ces parents ne comprirent pas vraiment ce qui lui faisait peur dans tout ça et pensèrent que ça lui passerait avec l’âge.

    Ils partirent une fois en vacances à l’autre bout du monde. Et pour ça, ils durent prendre l’avion, évidemment. Les parents du garçon qui avait alors sept ans s’inquiétèrent beaucoup de savoir comment leur fils allait réagir. Ils avaient raison. Si le check-in et le passage à la sécurité s’était bien passés, dès leur arrivée dans la zone de transit avec vue sur les appareils et leur ballet de décollage et atterrissage, le garçon se mit à hurler et agripper si fort la jambe de sa mère que tous les passagers se demandèrent ce qu’il se passait, tout en jetant des regards réprobateurs à ces deux parents qui ne savaient pas gérer leur progéniture.

    Finalement, une hôtesse vint et, offrant une sucette au garçon, parvint à le rassurer avec sa voix douce et son sourire enjôleur. Les parents espérèrent que tout irait aussi facilement dans la carlingue.

    Étonnamment, le voyage se passa sans encombre. Le garçon était resté tranquille et serein une fois à l’intérieur de l’avion. Ça n’était à y rien comprendre. Cet enfant avait peur de voir ces machines se déplacer dans le ciel mais il n’avait aucun problème à voyager dedans.

    Certains amis des parents avaient émis l’idée que leur enfant avait dû mourir d’un accident d’avion dans sa vie précédente. Il y en avait eu justement un quelques jours avant la naissance du bébé. Ces souvenirs inconscients le mettaient mal à l’aise. Seulement, les parents ne croyaient pas à ces balivernes.

    Les années passèrent. La peur des avions du garçon continua de s’exprimer malgré la force qu’il mettait à tenter de la contenir. Quand ils mangeaient sur la terrasse l’été et qu’une traînée blanche coupait le ciel, ses parents voyaient bien les yeux de leur fils faire des allers-retours frénétiques et inquiets, mais il ne disait plus rien et prenait sur lui.

    À dix-huit ans, le jeune homme partit pour de longues années pour ses études et n’eut que rarement l’occasion de rentrer voir ses parents. Quand ceux-ci lui avaient demandé ce qu’il étudiait, le jeune homme avait répondu assez évasivement.

    Il revint dans l’année de ses vingt-cinq ans affublé d’un uniforme reconnaissable entre mille, d’une veste avec galons sur les manches et d’une casquette d’aviateur. Ces parents crurent d’abord à une farce.

    Pour éviter d’avoir peur en voyant les avions voler au-dessus de lui, le jeune homme avait décidé de devenir pilote et dirigeait à présent ces engins qui l’avaient si longtemps effrayé.

  • 113 – Le commissariat

    phrase donnée par Amelodine

    « Excusez-moi, où se trouve le commissariat ? »

    Ce n’est pas compliqué comme question mais, quand tu la poseras, on te regardera avec un œil un peu étrange. Veux-tu y aller parce que tu as perdu tes papiers ou pour déposer plainte pour agression ou pour vol ? Si le passant questionné est un peu observateur, il remarquera que tu as toujours ton sac à main et en déduira, sans plus de réflexions que ce n’est pas pour vol. Il regardera avec un peu plus d’attention ton visage et les parties dénudées de ta peau pour y déceler des traces de blessures qu’il ne verra pas.

    Ça ne durera qu’une seconde, tout au plus.

    La perspicacité du passant n’arrivera pas à trouver la réponse à sa question : pourquoi une jolie petite jeune femme qui a l’air d’aller parfaitement bien veut aller au commissariat ? laissant sa curiosité inassouvie.

    Il se rendra compte qu’il devient malpoli à te scruter comme s’il était à la recherche d’indices sur un macchabé. Les deux secondes qu’il aura perdues avant de te répondre t’auront paru un peu longues. Tu commenceras à te dire que tu es, comme d’habitude, tombé sur le mauvais cheval, celui qui peut parler de tout mais ne sait rien. Il ne manquerait plus qu’il te pose des questions, dans le genre de pourquoi tu veux y aller, surtout en prenant des airs paternalistes si détestables.

    « Excusez-moi, dira-t-il finalement. Il se trouve juste derrière vous. »

    Tu te sentiras un peu idiote quand tu te retourneras pour voir cette grosse bâtisse qu’on ne peut pas rater, pourtant. Tu le bredouilleras quelques remerciements. Il te sourira en hochant légèrement la tête pour te souhaiter une bonne journée et grimpera, avec son énigme toujours irrésolue, les marches du commissariat, travaillant lui-même là.

    Tu sens que ça va se passer de cette façon, comme à peu près chaque fois. C’est pour ça que tu persévères à chercher et que tu ne veux pas demander ton chemin. Mais il faudrait que tu te dépêches. Ça sera mal vu d’arriver le premier jour en retard dans un nouveau poste, même et surtout en étant la nouvelle commissaire.

  • 111 – Le capharnaüm

    Désolé pour l’heure de postage de cette nouvelle !

    Phrase donnée par Amelodine

    Il alluma la lumière et découvrit le capharnaüm.

    Les meubles étaient déplacés ou carrément retournés. Les coussins avaient été tous éventrés. Les livres tous au sol, la verrerie en morceaux. Ça sentait le gaz à plein nez.

    Alfensen resta un instant sur le seuil de la porte, choqué. Il avait du mal à réaliser. Mille questions lui traversaient la tête. Au bout d’un instant, il réussit à faire un pas pour entrer et referma la porte derrière lui. Il ne voulait pas que les voisins découvrent et posent de questions.

    Fallait-il qu’il appelle ses supérieurs immédiatement ou qu’il attende un peu ? Il décida d’inspecter d’abord l’appartement et voir ce que les voleurs avaient pris. Ça n’était peut-être qu’un simple hasard mais il en doutait. Après trois ans à travailler en sous-marin dans cette bande de bikers qui passaient armes et drogue, il était possible que quelques-uns de ses « frères » aient eu des soupçons ou, et c’était la pire des éventualités, il y avait une taupe dans le service de la police qui rencardait sur les flics comme lui. Si c’était le cas, il avait intérêt à se faire extraire de ce merdier rapidement.

    En attendant, il fallait qu’il voie si les dossiers qu’il avait constitués étaient toujours planqués à leur place.

    Une fois dans la salle de bain, Alfensen déboîta la trappe donnant sous la baignoire et enfonça son bras pour aller chercher loin au fond. Il s’inquiéta un instant, ne trouvant rien mais finalement ses doigts frôlèrent un bout de plastique. Il souffla, soulagé. L’enveloppe hermétique, qui contenait nombre de preuves contre ces malfrats qu’il côtoyait quotidiennement, était encore là.

    L’attrapant du bout des doigts, il parvint à la coincer en l’index et le majeur et à la tirer vers lui. Il devrait la mettre un peu moins loin la prochaine fois quand même, se dit-il. Au moment où il tira franchement l’enveloppe pour enfin la sortir de sous la baignoire, Alfensen eut l’impression d’entendre un cliquetis mais n’y fit pas attention, trop pressé de voir les documents.

    Il ouvrit de larges yeux quand il vit que le contenu de l’enveloppe de plastique transparent avait été vidé pour être remplacé par une simple feuille blanche sur laquelle était écrit en rouge « CRÈVE SALE POULET ».

    Alfensen regarda ce mot deux secondes avant de se souvenir du cliquetis entendu quatre secondes plus tôt. Il se leva rapidement et essaya de sortir de la salle de bain mais la grenade explosa, enflammant le gaz répandu dans l’appartement.

  • 107 – Jet-Scoots

    Phrase donnée par Amelodine

    « Vu l’usage que tu vas en faire, je te conseille d’utiliser un dual-core. »

    Arsen, le vendeur de jet-scoots de compétition savait ce qu’il racontait. Ancien coureur professionnel, il avait ouvert cette boutique quand il s’était retiré du championnat après un gros accident. Depuis, il montait lui-même ses machines et les amélioraient au gré de ses envies. Évidemment, celles qui vendaient n’était pas aussi puissantes que ce sur quoi il avait eu l’habitude de concourir mais il avait le plaisir de faire partager son expérience.

    Quand le gamin était venu le voir la première fois, quelques semaines plus tôt, il n’avait jamais posé les fesses sur ce genre d’engins. Normal puisque avant douze ans, il était complétement interdit de monter dessus, il y avait eu trop d’accident mortels. Les sanctions était assez lourdes autant pour les adultes qui laissaient faire que pour les gamins qui transgressaient l’interdit. Ce qui n’empêcha pas Arsen d’amener le jeune à l’arrière de la boutique sur le simulateur. Il était habitué à faire ça. Deux ou trois fois, il avait fait monter des novices sur de vraies machines mais le dernier avait eu un accident assez grave et Arsen avait dû jouer de ses connaissances pour arriver à garder son magasin ouvert.

    Le gamin s’était assis sur la réplique de jet-scoot et avait tourné la poignée des gaz sans même que le propriétaire n’ait le temps de lui expliquer le fonctionnement. Les quelques premiers virages, les freinages furent un peu brutaux, le gosse frotta quelques bordures mais Arsen fut littéralement halluciné de voir comment ce môme, qui annonçait n’avoir jamais piloté ce genre d’engin, maîtrisait la bête. Évidemment, ça n’était que le simulateur, toutes les sensations n’y étaient pas mais la façon qu’il avait d’attaquer les trajectoires, de bouger sur l’engin était déjà impressionnante pour un nouveau.

    Le gamin descendit tout enthousiaste de sa course. D’un geste paternel, Arsen l’ébouriffa.

    « C’est pas mal ce que tu viens de me faire là ! Reviens me voir quand tu veux pour réessayer. » avait-il proposé. Le gamin l’avait remercié et était reparti comme un courant d’air, sans même lui dire son prénom.

    Quand les gosses arrivaient à son âge, en général, les parents craquaient et offraient le premier jet-scoot à leurs rejetons. Il était étrange que celui-là ne soit pas venu avec les siens mais ses performances éludèrent la question dans l’esprit d’Arsen.

    La fois d’après, Andrew, comme il s’appelait, revint seul encore et fit une nouvelle fois une course spectaculaire. À la troisième fois, qu’il vint sans adulte, Arsen posa la question :

    « Tes parents ont l’intention d’acheter un scoot pour ton anniversaire ?

    Andrew baissa le nez et hésita à répondre.

    — Allons, reprit Arsen, je vais pas te manger. Tu peux me dire.

    — Mes parents n’ont pas les moyens de m’en offrir un, même d’occas’, mais j’ai des amis à l’école qui m’ont dit que vous faisiez faire des tests gratuits sur simulateur. »

    Arsen fit la grimace. Il faudrait qu’il soit peut-être un peu plus strict. Cependant, ce gamin était peut-être le futur champion de courses de jet-scoot. S’il pouvait l’entraîner, ils pourraient, Arsen en était sûr, atteindre, la ligue nationale en moins de trois ans.

    Le gérant du magasin avait donné rendez-vous le jour de son anniversaire à Andrew. Il arriva, encore une fois seul, à la boutique en milieu d’après-midi après une modeste fête en famille. Il semblait tout excité par ce rendez-vous donné par l’ancien champion.

    Celui-ci n’y alla pas par quatre chemins et poussa le jeune garçon à l’arrière du magasin mais pas pour aller s’entraîner sur le simulateur. Il le fit sortir par la porte arrière pour aller dans le garage. Là, des jet-scoots étaient entreposés, certains entiers, d’autres en pièces plus ou moins détachées.

    Arsen s’agenouilla pour être à la hauteur des yeux d’Andrew. Il lui posa les mains sur les épaules en lui plongeant son regard dans celui du jeune garçon qui semblait intimidé.

    « Tu as aimé courir sur simulateur ?

    — Oui ! s’écria le garçon.

    — Crois-moi, ça n’est rien comparé aux sensations sur une vraie machine. Tu as l’étoffe d’un champion, j’en suis certain. Si tes parents sont d’accord et toi aussi, je vais t’entraîner et tu courras en compétitions dès la prochaine saison !

    — Super ! Andrew ne trouva pas grand choses à rajouter.

    Arsen se releva et regarda ses machines.

    — Vu ton style de pilotage, il te faudrait un moteur simple-core avec un système antigravitationnel double flux mais pour commencer en vrai, et vu l’usage que tu vas en faire, je te conseille d’utiliser un dual-core. C’est le mieux dans un premier temps. Mais d’abord, enfile-moi ces protections »

    Arsen jeta au gamin une combinaison renforcé et lui apporta un casque. Andrew était impatient de tester une de ces machines pour de vrai.

  • 101 – Alexeï & Igor

    Phrase donnée par Amelodine

    « Je ne suis pas d’accord avec toi !
    — De toute façon, tu n’es jamais d’accord avec moi !
    Alexeï et Igor étaient sur le toit de l’immeuble abandonné, dans le vent glacial. Le ciel était d’un bleu impeccable. Les seules traces de vapeurs venaient de la bouche des deux soldats quand ils parlaient mais elles disparaissaient rapidement dans l’air sec. Ils auraient pu discuter encore un moment pour savoir lequel des deux avait raison mais le froid leur engourdissait la figure et parler demandait un effort considérable.
    Leurs casques en cuir fourré les protégeaient un peu mais ne serait pas suffisant jusqu’au passage du convoi. Heureusement que les lunettes leurs protégeaient mieux les yeux, sinon, ils auraient déjà gelé dans leurs orbites.
    Les deux tireurs d’élite n’étaient pas d’accord quant aux positions qu’ils devaient adopter. Cela faisait vingt bonnes minutes qu’ils se chamaillaient pour savoir qui prendrait la meilleur place, celle qui permettrait d’atteindre un maximum de pilotes du convoi, laissant l’autre abattre ceux qui restaient — ceux que le premier avait raté — ce qui ne risquait pas d’arriver. Alexeï et Igor était les meilleurs de tout le pays et s’ils avaient été envoyé sur cette mission, c’est parce qu’il ne fallait pas qu’un seul de ces véhicules passent cette ville fantôme.
    Finalement, ils décidèrent de tirer à pile ou face. Mais se disputèrent à nouveau pour savoir qui lancerait la pièce. Malgré le fait qu’ils fussent les meilleurs amis du monde, ils passaient leur temps à se chamailler. Comme deux frères. Finalement, avant même qu’il ait pu se mettre d’accord sur la méthode de tirage au sort, des bruits de moteurs et de chenilles se firent entendre, résonnant en un écho lugubre sur les façades des bâtiments vides et branlants de cette ancienne métropole.
    Les deux soldats se jetèrent sur le sol recouvert d’une vieille couche de neige gelée depuis une éternité, chacun lançant un juron de mécontentement. Se relevant doucement et ajustant leur fusil, sur le petit rebord de toit, ils attendirent l’un à côté de l’autre, que la colonne de véhicule ne se montre. Ils savaient que s’ils échouaient, un peu plus loin attendrait une division complète de chars lourds mais leur honneur et celui de leur compagnie était en jeu. Ainsi que leur vie. On ne plaisantait pas avec la réussite des missions.
    Enfin le premier véhicule apparut à l’angle d’un ancien bureau de poste. C’était un véhicule à roues. Igor qui vit le conducteur en premier dans son réticule grogna pour faire comprendre à Alexeï qu’il s’en occuperait mais qu’il fallait laisser la colonne entrer complétement dans la rue pour l’avoir en visuel. Alexeï le savait tout aussi bien que son ami. S’ils abattaient le conducteur de tête, la colonne allait s’arrêter, se mettre à l’abri, voire battre en retraite. La mission ne serait pas complétement satisfaisante. Ils savaient que leurs scientifiques voulaient récupérer les véhicules pour étudier de potentielles améliorations trouvées par l’ennemi. Ce qu’il fallait faire était d’attendre que la colonne soit entièrement en visuel pour abattre les conducteurs de l’arrière vers l’avant, les premiers mettant toujours plus de temps à voir ce qu’il se passe à l’arrière.

    Douze véhicules se suivaient déjà dans l’ancienne artère principale de la ville. Les trois premiers étaient à roues. Les autres étaient des blindés à chenilles, trois transports de troupes et le reste des chars de combats. Ils n’avançaient vraiment lentement c’était louche. Igor grogna une nouvelle fois pour annoncer qu’il allait commencer le travail quand arriva à la suite de la colonne un char immense. Alexeï et Igor se regardèrent, pas vraiment sûr de ce qu’ils voyaient. L’engin était aussi grand que le bâtiment postal, soit quatre étages, environ quinze mètres. Les chenilles montaient plus haut que les chars traditionnels eux-mêmes, et le canon, semblant plus court, était d’un calibre impressionnant, Igor aurait dit le diamètre d’une roue de camion. Il avançait à peine plus vite qu’un homme à pied.
    « Essaie de voir où est le conducteur se trouve sur ce truc, Alex ! Annonça Igor. Moi, j’vois pas. Mais si on arrive à récupérer cet engin, ça va être la fête ce soir !
    Alexeï cherchait lui aussi dans sa lunette mais n’arrivait pas à voir de visage qui dépassait comme sur les autres chars.
    — Il est planqué à l’intérieur, annonça-t-il. On l’aura pas. Si tu veux qu’on le récupère, il faudra y aller au corps-à-corps. »
    Et pour faire ça, il fallait que la colonne s’arrête. Les deux snipers commencèrent leur besogne. Les six premiers conducteurs furent décimés quand les autres soldats formant les équipages se redirent compte du problème. L’arrière de la colonne s’arrêta. Les tireurs tentèrent d’atteindre les deux tireurs embusqués mais leurs mitrailleuses n’y parvinrent pas. Alexeï et Igor ne s’étaient pas mis là par hasard.
    Quatre tireurs furent neutralisés. Les autres allaient suivre quand la tourelle gigantesque du monstre de queue se mit en branle. Igor lança un nouveau regard incrédule à son ami. Une détonation retentit, répercutée sur les nombreuses façades d’immeubles, un sifflement, l’explosion d’un impact. Le bâtiment sur lequel les deux soldats se trouvaient trembla fortement. Ce prototype n’était pas fonctionnel d’après les renseignements qu’ils avaient reçus.
    Ils n’eurent pas besoin de parler pour se mettre d’accord sur le fait qu’ils devaient déguerpir le plus rapidement possible. Une seconde détonation tonna. Alexeï et Igor se ruèrent dans la cage d’escalier. Le bâtiment fut une nouvelle fois secoué. Ils descendaient les marches quatre par quatre, six par six. Dix étages plus bas, Alexeï avait l’impression que les murs n’étaient plus droits. Il ne savait pas si le char géant avait tiré au milieu ou au pied de l’immeuble mais s’ils ne sortaient pas rapidement, ils risquaient de mourir ici. Exhortant son ami à se dépêcher, Alexeï accéléra autant que possible son rythme de descente.

    Finalement arrivé au sol avant que la construction complète ne s’effondre, les deux soldats furent cueillis par les troupes ennemies qui avaient eu le temps de se mettre en place et de les attendre. Sans possibilité de se battre sans se faire tuer, les deux amis jetèrent leurs armes au sol et posèrent leurs mains sur la tête.
    « Cette mise en scène et la perte de quelques soldats valait bien le coup pour attraper les deux plus dangereux tireurs du continent ! Je suis le général Sergei Dachkov et vous êtes mes prisonniers ! »

  • 098 – La synthèse

    Phrase donnée par Amelodine

    « Je ne crois pas que le produit ait une bonne couleur » dit le chimiste en agitant son flacon de phthalocyanine.

    Le liquide, au lieu d’avoir une teinte bleu, ou au pire verte, avait pris un belle couleur orange. Il n’avait aucune idée de comment cela avait pu arriver mais ça le contrariait profondément.

    Le jeune homme en blouse blanche reposa son erlenmeyer et essaya de comprendre comment il avait pu arriver à un tel résultat. Tous les flacons sur la paillasse étaient les bons, il les avait préparés lui-même. Le mode opératoire avait été scrupuleusement suivi.

    Décidemment, ça n’était pas logique. Mettant le nez au-dessus de sa mixture, le chimiste,  fut étonné de sentir une bonne odeur de jus d’orange fraîchement pressée. D’abord étonné, il sentit plusieurs fois mais ne put que tirer la conclusion que c’était bien du jus d’orange ou un ersatz très ressemblant. Très tenté de goûter, il n’osa pas, de peur de s’intoxiquer. Il devrait essayer sur les rats du labo d’à côté.

    Dans sa tête se bousculaient mille idées mais la seule qui prenait beaucoup de place lui disait qu’il avait trouvé la recette pour synthétiser facilement du jus d’orange. S’il arrivait à retrouver exactement comment il avait fait, il pourrait vendre le brevet à une grande entreprise agro-alimentaire et deviendrait riche.

    Attrapant un bécher et le mode opératoire de la synthèse du phthalocyanine, le jeune homme entreprit de recommencer l’expérience pour voir où les choses avaient dérapé et voir s’il pourrait retrouver la voie vers le jus d’orange synthétique. Il était très excité par cette découverte, partagé entre l’envie d’en parler à tous ces collègues pour les impressionner et la peur que l’un d’eux lui en vole la paternité.

    Au bout d’une heure, le chimiste avait recommencé trois fois l’expérience mais avait chaque fois obtenu le liquide bleu prévu par sa recette. Il commençait à désespérer.

    Un de ces collègues entra dans la pièce. Il s’enquit de voir le jeune homme dans un état étrange.

    « Ça va pas ? Tu as un problème pour ton expérience ?

    — Je n’arrive pas à faire ce que je veux avec cette synthèse, ça m’énerve un peu.

    L’autre attrapa les flacons les uns après les autres et les agita en les regardant avant de les reposer.

    — Ils m’ont tous l’air très bien, pourtant. Par contre, je m’attarde pas, je viens juste récupérer mon jus d’orange, je l’avais laissé là pour qu’il soit à température ambiante.

    Le jeune chimiste regarda son collègue l’air plus qu’étonné.

    — C’est ton jus ?

    — Oui, je l’ai sorti tout à l’heure, et j’ai mis… ah ça devait être à toi, il y avait un flacon de ça, dit-il en montrant les autres flacons nouvellement synthétisés. Je l’ai mis dans le frigo comme tu n’étais plus dans la pièce.

    — Ah. Oui. Merci… »

    L’autre prit son erlenmeyer de jus d’orange et sortit de la pièce, laissant le jeune homme sur ces illusions de richesse.

  • 081 – Le désert

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Amelodine

    Si j’avais fait la révision de ma voiture, peut-être que je ne serais pas là, coincé dans ce désert, avec une chance de survie des plus moindres.

    Je serais au bord de la piscine de l’hôtel à siroter un bon mojito en train de mater les nanas en maillot de bain, en attendant juste que Christen arrive, avant de nous envoyer en l’air pendant des heures dans notre chambre climatisée.

    Et là, je suis en train de marcher en espérant trouver une hypothétique station service et une dépanneuse. Si au moins le moteur avait continué de tourner, j’aurais pu rester dans l’habitacle de ma bagnole avec la clim’ à fond.

    Je ne suis même pas sûr qu’il y a une station à une distance humainement atteignable. La chaleur fait danser le décor. Je n’ose pas enlever ma veste de peur de cuire littéralement mais je transpire à fond. Quelle horreur ce désert. Si Dieu existe, il faudra qu’il m’explique pourquoi il a créé ça. Et les moustiques aussi. De la saloperie ces trucs.

    Et puis le téléphone portable qui ne passe pas. Absolument pas de réseau. À se demander pourquoi on paye aussi cher pour un service aussi merdique. C’est quand même plus facile en plein milieu de Manhattan de trouver une ligne fixe pour les appels d’urgence, par contre, en plein désert, non, c’est pas la peine d’espérer, puisqu’il n’y a pas de réseau. Fait chier.

    Je crois que la soif commence à me rendre vulgaire.

    Et aucune voiture qui passe. C’est vraiment mon jour de malchance, aujourd’hui. Manquerait plus que je tombe sur un cimetière indien hanté ou le site de crash d’une soucoupe volante extra-terrestre et j’aurais tout gagné. Me faire courser par un puma ou un coyote. Je ne sais pas, mais je commence à devenir dingue sous cette cagna.

    Je ne sais même pas comment j’arrive encore à marcher, comment mes jambes me portent encore. J’ai l’impression que si je tombe, je n’aurais pas la force de me relever. Je préférerais me laisser mourir sur place. Je ne sais même pas pourquoi je continue en fait, je commence vraiment à me dire que je vais mourir ici et donner à manger aux vautours et autres habitants de ce désert.

    Au bout d’un temps qui me paraît une éternité, j’entends le ronronnement d’un moteur. Au loin venant de là où je suis en panne, je vois un camion. Mon sauveur. S’il s’arrête.

    Finalement, il arrive sur moi. Grâce à mes grands signes et sûrement aussi à ma tronche tannée par le soleil.

    À l’intérieur, je vois le conducteur qui me demande ce qu’il se passe. Je lui explique en montant avec difficulté dans la cabine. Le gars m’explique la prochaine station service est à environ quatre-vingt miles de là. Il m’y dépose sans problème. Je ne sais pas pourquoi Dieu à créé les déserts mais à cet instant, je le remercie d’avoir créé les routiers.

    Il me propose à boire, j’accepte avec plaisir. Ma gorge est tellement sèche… Rapidement, je m’endors, bercé par le mouvement tranquille de la cabine et harassé par la chaleur et la fatigue.

  • 073 – Le brocoli

    Phrase donnée par Amelodine

    Aujourd’hui, j’ai rencontré une personne qui promenait son brocoli dans une sandale. Son air heureux contrastait avec mon air interrogateur. En réalité, je n’étais pas vraiment le seul à le regarder comme un extra-terrestre. Tous les gens qu’il croisait avaient plus ou moins la même réaction. J’ai vu quelques personnes s’écarter discrètement de quelques pas, comme si l’envie de promener un légume dans une chaussure était une maladie contagieuse. Certains autres fronçaient ou levaient les sourcils, réprobateurs ou tout bonnement halluciné.

    Que peut-il passer dans la tête de quelqu’un pour le décider à faire d’un brocoli son animal de compagnie ?

    En attendant mon métro, continuant à regarder cet homme qui tenait cette sandale comme on porte un bébé, la berçant de la même façon, j’ai laissé mes pensées divaguer.

    Était-ce un artiste de rue qui jouait sa performance pour rendre les transports en commun moins moroses ?

    Peut-être avait-il un super pouvoir lui permettant de parler aux légumes ou au moins les entendre se plaindre des mauvais traitements subits.

    Ou alors, il avait été ensorcelé et pensait que ce brocoli était son enfant. Ou c’était son enfant qui avait été ensorcelé pour devenir prisonnier sous cette forme végétale.

    Mon esprit commençait à s’emballer dans des théories plus fumeuses les unes que les autres.

    Peut-être était-il juste fou ?

     

    Le métro est arrivé. Je ne savais pas s’il allait lui aussi rentrer dans la rame, mais j’étais sûr qu’il m’accompagnerait toute la journée dans mes pensées.

    Les portes se sont ouvertes. Le flot de gens m’a littéralement poussé dans la voiture.

    L’homme restait là. Il a été bousculé par un des nombreux passagers, irrité de cet obstacle l’empêchant d’aller s’entasser avec ses congénères. Le brocoli est tombé par terre. Le fou a rapidement ramassé son enfant pour qu’il ne soit pas écrasé par les derniers voyageurs qui se pressaient pour permettre à la porte de se refermer.

    Le signal sonore a retenti.

    Venu de nulle-part, l’homme qui avait bousculé le fou a soudain reçu un coup de sandale derrière la tête. Malgré sa position instable en bord de porte, il s’est retourné pour voir le propriétaire de l’enfant-brocoli lui assener un nouveau coup de tatane. Il n’a pas eu le temps de réagir que les portes se sont refermées créant un mouvement dans la masse humaine grognante.

    Le métro a démarré. J’ai juste eu le temps de voir mon fou, câliner son brocoli, l’embrasser tendrement comme un enfant pour lequel on s’est beaucoup inquiété.

    À moitié écrasé contre la vitre du métro, quelqu’un me marchant sur les pieds, je me suis mis à sourire.

    Peut-être est-ce nous, les fous.

  • 057 – Simulation

    Phrase donnée par Amelodine

    « Ça ne sert à rien de paniquer, franchement.

    — Arrête Will, si on se fait tracer, je vais avoir les services secrets ou l’armée sur la baraque en moins de dix minutes ! Si on me reprend à pirater des systèmes d’État, je vais prendre perpét’.

    — Putain ! Qu’est-ce que t’es devenu froussard depuis ton procès.

    — Depuis les interrogatoires en fait ! rectifia Greg.

    — Y a pas moyen qu’ils nous choppent. Il leur faudrait des heures pour remonter tous les proxys à partir du moment où il nous aurait repéré. Et déjà ça, c’est pas gagné. Et puis je l’ai déjà fait de chez moi et je suis encore là, non ? Alors assieds-toi et respire. Tu vas voir, c’est juste l’éclate. »

    Greg se posa sur son lit et regarda son meilleur ami continuer à taper ses lignes de code. Il n’aimait pas trop entrer illégalement dans les réseaux nationaux depuis que, trois ans plus tôt, il avait été arrêté pour s’être introduit dans les bases de données de la Banque Centrale. À quatorze ans, les quarante-huit heures de garde-à-vue qu’il avait subies avait été assez traumatisante. Il ne voulait vraiment plus vivre ça. Même si ce que lui avait promis Will avait de quoi faire rêver : une simulation de course voitures ultra-réaliste.

    « Et voilà ! annonça fièrement celui-ci s’enfonçant dans le siège de bureau les mains derrière la nuque. Y a plus qu’à attendre que les machines moulinent pour la reconstruction temps-réel. Tu vas voir, c’est un truc de malade.

    Greg se rapprocha du bureau et regarda l’écran afficher petit à petit le décors : le périph de la ville en deux fois trois voies.

    — C’est dingue comme c’est réaliste, on s’y croirait. La gestion du trafic a l’air vraiment bonne. Le jeune homme était bluffé de tant de réalisme, on aurait dit un film. Will fit bouger la caméra qui survolait les véhicules. C’était extrêmement réaliste.

    — Tu veux quoi comme bagnole ? Une Ferrari ? Lamborghini ?

    — File-moi une Aston Martin, la Vanquish, en général je la gère bien sur Gran Turismo.

    — Tu veux choisir les options et la couleur ?

    — Prends-la full-options noire.

    Will tapota quelques nouvelles lignes de commandes et dans l’écran de la ville, apparut au milieu de la route. Immédiatement, les voitures s’écartèrent de façon chaotique en klaxonnant. Will se leva de la chaise pour laisser la place à son ami.

    — Amuse-toi bien ! »

    Greg attrapa le volant et appuya sur la pédale d’accélérateur. La voiture vue de l’intérieur démarra et suivit les mouvements du conducteur d’une façon très réactive. Le joueur roulait beaucoup plus vite que les autres véhicules et se faufilait entre.

    — Et c’est quoi le but du jeu ? Parce que j’ai l’impression d’être le seul à faire la course là.

    — Évidemment, puisque tu es le seul connecté pour l’instant. Les autres bagnoles, ce sont juste les gens en train de rentrer du boulot.

    — Et tu peux pas passer en mode milieu de la nuit endiablée ? Parce qu’on dirait que je leur fais peur. J’aimerais bien me faire une vraie petite course. Au moins sans les boulets qui me gênent…

    — Je crois que t’as pas bien saisi, Greg. Là, tu joues dans le trafic en temps réel. Les voitures que tu voies, elles sont en vrai sur le périph.

    — Quoi ? C’est dingue. Mais comment ça se fait qu’elles s’écartent quand j’arrive alors que ma voiture n’existe pas.

    — En fait, ta voiture existe pour tous les GPS et radars internes des voitures comme le signal passe par le serveur central de localisation et de gestion du trafic. En vrai, les gens ne savent pas pourquoi leurs voitures ralentissent ou se poussent de leurs trajectoires parce que pour eux, il n’y a rien. Juste les machines et leurs systèmes de conduite sécurisée qui croient que tu es là et réagissent en fonction.

    — Attends, c’est un truc de dingue. Tu as réussi à entrer dans ce système ? Moi qui croyais que tu avais juste piraté les caméras pour que le rendu 3D soit ultra-réaliste…

    — En fait, je passe par plusieurs plateformes. Il y a les caméras de la ville pour modéliser le circuit, enfin, le périph ; il y a le système des données de gestions du trafic pour le positionnement de ton véhicule et l’interaction avec les autres ; les bases de données constructeurs pour avoir les caractéristiques des véhicules que tu peux conduire. Plus deux ou trois autres menus serveurs. J’ai eu du mal à tout coordonner au début mais le plus chaud, ça a été de trouver une machine assez puissante pour gérer tout ça, mais là, c’est bon, c’est stable.

    Will était fier de lui et cela se voyait à son sourire.

    — Si tu te fais choper tu pars en taule pour mille ans sans plus jamais toucher un ordinateur…

    — Impossible. Je passe par des serveurs chinois et des iraniens, boliviens… de partout, quoi. Je crois même qu’il y en a un au Botswana.

    — Et ton calculateur, tu l’as trouvé où ? À la NASA ?

    — Non, c’est le supercalculateur de la météo. Faudra pas s’étonner si les prévisions sont pas top les prochains jours.

    Greg sourit et reprit sa conduite, mettant encore une fois la zizanie dans le trafic routier.

    Au bout d’une dizaine de minutes de jeux, il avait parcouru une bonne partie du circuit. Des sirènes se firent soudain entendre, rapidement suivie par l’arrivée de voitures de police à l’écran. Greg se tourna vers son ami, l’appelant à l’aide du regard.

    — Ils te voient pas, tu n’existes que pour les machines. Tu n’es même pas là, en fait.

    Greg se leva en s’éloignant de la machine. Will se jeta sur le clavier et d’une combinaison de touches coupa la connexion. Il posa la main sur l’épaule de son ami pour le rassurer.

    — T’as rien à craindre, je te dis. Fais-moi confiance.

    — Je veux pas repartir en taule, moi. Laisse tomber, ça me fait trop flipper. »

  • 054 – L’inventeur

    Phrase donnée par Amelodine


    Le ventilateur restait là, sans pâles pour fonctionner. Et pourtant, Melreing n’en tirait aucun émoi. Pour lui, le plus important était là. Sa machine était terminée et il allait pouvoir la tester bientôt. Il savait bien que monsieur le comte ne serait pas content de voir qu’il avait démonté sa machine préférée mais il changerait peut-être d’état d’esprit en voyant le résultat.

    Car le résultat était vraiment impressionnant.

    Melreing, le jeune neveu du comte d’Herdeinburg, était un féru de technologie et un ingénieur autodidacte hors-pair. Il avait commencé à démonter des machines dès l’âge de huit ans et les avait rapidement amélioré ou en avait construit de nouvelles à partir de pièces existantes, voire à partir de rien. Il disait qu’il voyait les schémas dans sa tête et qu’il n’avait pas besoin de les coucher sur le papier comme le faisaient la plupart des inventeurs.

    Du haut de ses quinze ans, ce passionné avait déjà réussi à faire fonctionner un modèle réduit portatif de générateur électrique fonctionnant à vapeur, créé une machine qui soufflait de l’air chaud grâce à une résistance électrique, toujours, et qui servait à faire sécher les cheveux, ou encore fabriqué une réplique d’automobile, qui n’avait fonctionné malheureusement que peu de temps.

    À présent, le voilà qui travaillait sur un autre de ses sujets de prédilection : l’aéronautique.

    Melreing s’était réveillé avec la ferme intention de mettre en œuvre cette idée qui tournait dans sa tête depuis quelques jours.

    Il voulait construire un ballon dirigeable. Il avait décidé qu’il réussirait à en faire un à taille « humaine » même si évidemment, les premiers prototypes seraient des modèles réduits.

    Donc depuis ce matin, le jeune homme avait passé le plus clair de son temps dans l’atelier de son oncle, parti en ville pour régler des affaires commerciales.

    Après avoir réussi à fabriquer une belle structure en ogive pour le côté aérodynamique, Melreing l’avait recouverte de soie, prise sur des draps chapardés à la lingerie. Pour l’instant, il n’avait pas accès à des gaz plus légers que l’air comme l’hélium ou l’hydrogène, il préféra donc prendre la résistance de son sèche-cheveux pour faire chauffer l’air dans l’enveloppe. Et pour la partie dirigeable de la machine, il avait repris son mini-générateur électrique à vapeur et l’avait installé sous l’enveloppe, tout en tirant un arbre de transmission sur lequel il avait attaché les pales du ventilateur de son oncle. Le tout devait pouvoir propulser la machine. Il avait terminé en tirant des câbles des deux machines électriques embarquées autant pour pouvoir gérer les puissances émises et rendre la machine vraiment dirigeable, que pour garder un lien avec, au cas où cela fonctionnerait trop bien.

    L’engin terminé de monter, Melreing commença à faire chauffer la résistance. Il fallut quelques minutes pour que la température de l’air soit suffisante pour faire s’élever l’objet. Le jeune homme ne voulait pas pousser la résistance trop fort de peur d’enflammer la soie. Au fur et à mesure que l’enveloppe s’élevait dans l’atelier, le cœur du jeune homme battait plus fort et s’emplissait d’une liesse indescriptible. Quand le dirigeable fut à environ un mètre du sol, Melreing actionna le moteur de l’hélice qui se mit tranquillement en branle. La machine commença tranquillement à avancer, lentement au début puis à la vitesse d’un homme à pied. Heureusement que le jeune homme avait pris la précaution d’ouvrir en grand les portes de l’atelier. Il suivit le dirigeable dans le jardin, comme un maître suit son chien en laisse. Le jeune homme jubilait de voir cette machine flotter dans les airs et avancer à bon rythme dans le parc de son oncle. En passant devant l’entrée, il vit justement la voiture de ce dernier indiquant qu’il était rentré. Melreing avait hâte de lui montrer sa dernière fabrication.

    C’est alors qu’il entendit la voix de son oncle hurler son nom de l’atelier. Il venait sûrement de découvrir l’état de son ventilateur. Le jeune homme espérait vraiment que sa dernière invention pourrait le calmer.