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  • 014 – Les étoiles

    phrase donnée par Astray

    Le truc bien avec les étoiles, c’est qu’elles sont suffisamment loin pour que les habitants potentiels puissent nous ignorer sans qu’on le sache.

    Tant qu’ils restent sur leurs planètes respectives.

    Évidemment, si tous décidaient d’aller voir ce qu’il se passe chez les autres, je ne sais pas ce qu’il se passerait.

    Nous sommes partis depuis si longtemps de chez nous. Je ne suis même pas sûr de savoir combien de générations sont nées à bord de notre vaisseau. Je ne sais pas s’il reste des gens sur Terre pour se souvenir que nous sommes partis ni pourquoi nous l’avons fait.

    Je souris.

    Je dis « nous » mais je n’y étais évidemment pas. Mon aïeul devait le savoir mais la raison qui nous est parvenue doit avoir été déformée par les souvenirs. Surtout depuis que la base de données du vaisseau a été détruite suite à une avarie.

    Depuis les savoirs se transmettent de manière orale, à la façon des anciens temps. Ils me semblent aussi irréels que les temps dit modernes qui nous ont vus partir vers une autre planète. La Terre était mal en point, les problèmes s’accumulaient, l’air n’était plus respirable, l’eau plus potable, la vie disparaissait lentement mais sûrement. Peut-être sommes-nous les derniers représentants d’une espèce éteinte depuis des centaines d’années.

    À présent, le commandant du vaisseau nous mène là où ses ancêtres lui ont dit que nous avions prévu d’aller. Nous ne sommes pas sûrs d’y trouver une terre d’accueil mais nous n’avons nulle part d’autre où aller. L’énergie utilisée pour le voyage ne nous permet pas d’aller ailleurs que sur cette petite planète.

    Que je ne verrai jamais.

    Il est prévu que nous y arrivions dans cent-vingt ans environ. Je serai morte et mes enfants le seront sûrement aussi. Ici, il n’y a pas de politique de maintien en vie à tout prix. De toute façon, personne ne veut rester dans cet environnement trop longtemps. Si on ne sert à rien, on est un fardeau pour les autres, alors autant mourir et être recyclé pour nourrir ceux qui restent.

    Des fois, j’ai l’impression que nous sommes des prisonniers. Je ne sais pas quels crimes ont commis nos ancêtres mais nous les expions de générations en générations, enfermés dans cette petite boîte de métal propulsée à trois fois la vitesse de la lumière à travers les astres.

    Il est étrange de se dire qu’avant, une personne qui levait les yeux au ciel étoilé voyait ce que toutes les personnes qui étaient passées là avant elle voyait. Moi, d’un jour à l’autre, je vois les astres sous des jours différents. Des jours. Quelle drôle d’expression qui nous reste d’un monde inconnu pour nous qui sommes dans l’obscurité de l’univers toute la journée.

    Nos premiers scientifiques se sont rendu compte qu’une journée de trente heures était le temps optimal pour nous. Alors les lumières artificielles ont été reréglées pour ce faire. Les jours comme nos ancêtres les ont connus sur Terre sont quelque chose de complétement inconnu pour nous.

    Des fois j’ai l’impression que nous sommes des rats de laboratoire dont le propriétaire serait mort. Nous continuons notre vie comme si de rien n’était mais nous n’avons pas vraiment de but. À part cette planète. Espérons qu’elle ne soit pas habitée ou alors pas par des gens hostiles.

    « Chérie ? Que se passe-t-il ?

    — Rien, rien… Je n’arrivais pas à dormir.

    — Encore ? Ça arrive de plus en plus souvent ces temps-ci. Qu’est-ce qui ne va pas ?

    Je m’éloigne de la grande fenêtre qui donne sur l’immensité du cosmos et m’assoit dans le bord du lit.

    — Des fois, j’ai l’impression que nos vies ne mènent à rien. »

    Mon mari va pour me dire quelque chose qu’il voudrait réconfortant mais qui n’arrivera pas à me sortir de cette dépression mais il se ravise. Il fixe la baie, se lève et s’en approche, la bouche toujours ouverte. Étonnée, je le rejoins. Qu’a-t-il pu bien voir de si spécial ?

    « Là-bas » réussit-il à peine à articuler quand j’arrive à sa hauteur. Du doigt, il me montre un objet qui n’a pas l’air d’être un corps céleste et qui se dirige droit sur nous. Très vite. Ça a l’air propulsé. Il y a une forte lueur derrière.

    Je me précipite vers le téléphone et appelle la salle de commandement. Il est impossible que nos radars soient passés à côtés.

    Je lâche un juron. La ligne est occupée.

    L’objet ralentit et vient se positionner à côté de nous. C’est un vaisseau. Il est très différent du notre et il est trop loin pour que j’arrive à distinguer quoi que ce soit à travers ses fenêtres.

    Soudain, les haut-parleurs du vaisseau résonnent avec la voix de notre commandant :

    « Mesdames et messieurs. Ceci n’est pas un exercice. Nous venons d’être accostés par un vaisseau d’une planète inconnue. Nous avons réussi à nous transmettre des informations mais nos langages sont très différents. Il nous est pour l’instant impossible de savoir si ces êtres sont pacifiques ou non. Restez sur vos gardes mais accueillez-les du mieux que vous le pouvez. »

    Des larmes coulaient le long de mes joues. C’était le jour le plus beau de ma vie. J’avais l’impression qu’elle commençait pour de vrai. Quoi que ces êtres nous apportent.

  • 009 – La Parole

    Phrase donnée par Astray

    La parole donnée doit absolument être respectée, l’ennui, c’est quand on la donne sans réfléchir.

    En général, en plus, c’est forcément quand tu n’arriveras pas à la tenir, que tu donnes ta parole aux mauvaises personnes.

    Disons qu’un jour, tu te réveilles et ta femme te pourrit comme du poisson. Elle vient de se rendre compte que tu bouffes un peu — beaucoup — les économies que vous aviez prévu pour les études des gosses — que vous n’avez toujours pas — dans des parties de poker dont tu sors rarement — jamais — gagnant. Le même jour, tu arrives à ton boulot et ton patron te convoque. Tu fais un boulot de petit comptable dans une petite boîte dans le bâtiment. Il s’est rendu compte qu’il y a des erreurs d’écritures et qu’il manque un gros paquet de fric dans le coffre comparé à ce qu’il devrait y avoir.

    Ta journée commence vraiment à être merdique, pas vrai ?

    Si. En fait non ! Elle le devient pas, elle l’est déjà depuis au moins des mois, chacune d’entre elles. Et dans toute cette histoire c’est quand même un peu ta faute. Mais ça, c’est pas grave.

    Après tout, cette pauvre conne avec qui tu t’es marié n’a qu’à réussir à tomber enceinte mais avec tous ces régimes à la cons, c’est pas simple a dit le docteur, elle a pas vraiment voulu écouter. Donc pour te venger t’as préféré dilapider les économies. Pas de problème. Je comprends.

    Et ce connard qui te fait bosser cinquante heures par semaine en te chiant dans les bottes à longueur de temps sans vouloir jamais t’augmenter à par le minimum légal — parce qu’il a pas le choix —, ce connard, c’est normal que tu piques un peu dans la caisse, c’est un juste retour des choses. Tu prends ce qu’il aurait dû te donner depuis longtemps. Qu’il ne s’en prenne qu’à lui-même.

    C’est sûr, ces deux connards n’avaient que ce qu’ils méritaient. C’est même étonnant que deux sous-merdes pareilles n’aient pas réussi à coucher ensemble dans ton dos. Quoique. T’en sais rien en fait. Surtout maintenant qu’ils sont au fond d’un trou, complétement cramés. Ils ont suppliés comme des gonzesses, enfin, ton patron. Comme quoi, l’expression est peut-être mal choisie.

    Bref. Tout ça pour dire que tu avais donné ta parole. Mon patron avait donné la sienne. Quand tu as demandé un petit délai, il a pas été chien, il te l’a accordé. Alors maintenant, pour bien faire comprendre à tout le monde qu’il aime pas être pris pour un con et que la parole donnée, c’est important de la respecter, tu te retrouves à genoux dans une petite rue avec le canon de mon flingue sur l’arrière de ton crâne. Toi aussi, tu pleures comme une gonzesse. Au moins, ta femme, elle, s’est bien tenue quand je m’en suis occupé. Elle n’a fait que t’insulter, finalement pas surprise.

    La prochaine fois que tu engages des gens pour te délester de fardeaux, assure-toi de pouvoir payer à temps.

    Et évite de salir mes pompes une fois que je t’aurai flingué.