Tag: Julien V.

  • 090 – La disparition

    Phrase donnée par Julien V.

    Il voulut déverrouiller son iPhone mais ses empreintes digitales avaient disparu.

    Au milieu de la rue, alors que le flot des gens allant et venant le bousculait, il resta là un instant, son téléphone dans une main et fixant l’autre, grande ouverte. Comment était-ce possible ? Ce matin encore, il les avait. Il avait réussi à utiliser son iPhone et avait parfaitement vu son pouce déposer son empreinte sur son verre de jus d’orange pendant le petit déjeuner. Ou peut-être était-ce hier ? Il n’était plus sûr.

    Il fallait qu’il appelle Aby et ne pouvait utiliser cette connerie de machine. Pas la peine d’espérer trouver une cabine téléphonique, il n’en avait pas vu depuis au moins dix ans. Aby, cette belle brune qu’il avait rencontrée dans une soirée étudiante alors qu’ils préparaient leur diplôme d’ingénieur en physique quantique. Ils avaient complétement flashé l’un sur l’autre et elle était rapidement venue s’installer chez lui. Il s’en souvenait comme si c’était hier. Ou alors, c’était lui qui avait emménagé chez elle ?

    Essayant de se calmer, il leva le nez pour voir où il était et surtout pour prendre le temps de savoir ce qu’il allait faire. Logiquement, il avait rendez-vous au musée d’art moderne. Ou bien était-ce à l’exposition de sculpture dans le parc. Il avait l’impression d’avoir de la boue à la place du cerveau à présent. Impossible de se souvenir de quoi que ce soir de vraiment clair. Passant la main sur son visage, il fut surpris par la taille de son menton et de son nez, le manque de saillant de ses pommettes. S’approchant d’une vitrine, il fut surpris de ne pas reconnaître la personne dans le reflet. Ses yeux n’avaient plus leur couleur habituelle, ses cheveux étaient plus brun, son visage n’avait plus les mêmes traits. Que se passait-il ? Était-il dans un cauchemar ?

    Il fallait qu’il rentre chez lui et prévienne cette fille avec qui il vivait, mince comment s’appelait-elle déjà ? Il n’était même plus sûr de se souvenir d’elle.

    Soudain, une camionnette blanche arriva en trombe et s’arrêta à sa hauteur dans un crissement sec de pneu. Deux armoires à glace en costumes noirs débarquèrent de la porte latérale arrière, lui tombèrent dessus et le traînèrent à l’intérieur du véhicule malgré ses tentatives veines à se débattre.

    Rapidement plaqué sur un brancard, un troisième homme, en blouse blanche, le piqua au bras, sans plus de délicatesse. Il hurla sous la douleur. L’un des deux molosses lui posa, sans trop de délicatesse, un tissu sur la bouche pour étouffer ses cris.

    « Réimplantation du programme ! annonça le docteur, appuyant sur son oreillette. Ça tient de moins en moins longtemps ! Il va falloir trouver une solution rapidement, une fois sa mission terminée ! »

    Le docteur approcha une sorte de stroboscope des yeux du prisonnier qui vit des images entre les flashes, pas certain de savoir s’il s’agissait de souvenirs ou d’autres choses.

    Sans réfléchir, agissant comme par réflexes, il envoya un coup de tête dans le stroboscope. De surprise, un des molosses relâcha son étreinte, suffisamment pour permettre au prisonnier de libérer son bras et de lui envoyer un violent coup dans le nez, l’assommant. Arrachant l’étrange machine des mains du docteur, il frappa avec force le second molosse. L’homme en blouse recula autant qu’il le put, jusqu’à être plaqué contre la paroi du véhicule.

    Le prisonnier bondit du brancard, ouvrit rapidement les portes arrières du véhicules et sauta sans plus réfléchir du véhicule en marche.

    Atterrissant dans un roulé-boulé sur le bitume sous les regards ébahis des passants, il parvint à se relever rapidement et pris ses jambes à son cou, malgré l’extrême fatigue qui commençait à le prendre. Il ne savait pas quel type de sédatifs il avait reçu mais s’il n’arrivait pas à se cacher rapidement, ces salauds le rattraperaient sans problème. Les pneus du van crissèrent. Le véhicule manqua de créer un accident.

    Il n’y avait pas de temps à perdre.

    Il vit le molosse encore en état sortir et courir dans sa direction, bousculant les gens sans ménagement.

    S’engouffrer dans un grand magasin était peut-être le seul moyen de parvenir à le semer. Il monta quelques étages en prenant les escaliers, redescendit par d’autres et, de plus en plus assommé par les drogues, décida d’aller se cacher dans les toilettes. Dans un sursaut d’esprit, il s’engouffra dans celles pour dames et s’enferma dans une des cabines. Recroquevillé sur la cuvette, la tête posé sur ses bras croisés, il essayait de comprendre ce qu’il lui arrivait.

    Mais plus il réfléchissait, moins il parvenait à se souvenir de quelque chose. Jusqu’à ce que le trou noir de l’anesthésiant le happe.

  • 078 – Le hamster

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Julien V.

    « Madame, j’ai le regret de vous dire que votre Hamster est schizophrène.

    La nouvelle lourde de sens avait fait tomber le silence dans la pièce. J’avais regardé ma mère avec un regard d’incompréhension pendant que celle-ci, fixant le vétérinaire, avait essayé d’assimiler l’information. Dans un réflexe tout maternel, elle me serait contre elle en me caressant les cheveux. Au bout d’un instant, elle se hasarda à demander :

    — Ça se soigne ?

    La physionomie du docteur avait changé à plusieurs reprises mais pour chaque fois prendre une expression gênée ou confuse.

    — Écoutez, madame, à ce stade, nous ne sommes pas très avancés pour ce genre de problèmes mais il y a des rayons, des traitements expérimentaux… »

    Ma mère avait souri. Moi, je ne comprenais absolument pas ce que racontaient ces adultes. Je voulais juste que Pico, mon Hamster aille mieux. Cela faisait des jours qu’il passait d’un état où il ne mangeait plus rien à un état où il mangeait trois fois son poids. Des fois, il était très affectueux et parfois très agressif, au point de mordre tout le monde. Et depuis la veille, il ne faisait plus que dormir. Ça m’inquiétait beaucoup. J’aimais énormément ce hamster. J’avais tanné ma mère pour aller le faire soigné. Au début, elle n’avait pas l’air très d’accord et finalement, elle avait cédé.

    Le vétérinaire s’était levé pour faire le tour de son bureau et s’agenouiller à ma hauteur.

    « Pico est très malade. Il peut continuer à vivre encore longtemps, mais il souffre et risque d’être dangereux pour lui comme pour toi ou ta famille. Tu comprends ?

    J’avais secoué la tête pour répondre que oui, même si je n’arrivais pas à comprendre comment Pico pourrait être dangereux.

    — J’ai un moyen de le guérir mais il y a des effets étranges parfois. Si Pico redeviendra très gentil, il y a des risques qu’il ait du mal à te reconnaître et il va peut-être changer un peu aussi, comme grossir ou avoir les poils qui poussent.

    J’avais encore une fois secoué la tête, pas vraiment sûr de comprendre mais je savais que je voulais sauver mon ami.

    — Tu acceptes qu’on essaie le traitement sur Pico ?

    — Oui, docteur, sauvez-le ! » avais-je simplement dit.

    Je me souviens de ma mère poussant un long soupir de soulagement. Nous étions retournés en salle d’attente. Ça avait duré des heures. Et finalement, le vétérinaire nous avait rappelé. Il souriait en grand. Après nous avoir invités à nous asseoir, il croisa les mains, posé sur son bureau, comme il avait l’habitude de le faire, et prit une inspiration. Il parla en me regardant.

    « La thérapie s’est bien passée. En revanche, il y a bien eut des effets un peu indésirables sur Pico. Comme je t’avais prévenu, il a pris du poids, ses poils son plus longs, ainsi que ses oreilles, mais le plus important est qu’il est guéri ! »

    Il se leva pour aller chercher dans la pièce de derrière notre cage et Pico à l’intérieur. Effectivement, il avait un peu changé mais alors, je m’en fichais complétement. J’étais juste heureux de le retrouver en pleine forme.

    Finalement, Pico a vécu longtemps, beaucoup plus d’années qu’un hamster classique. Mais à présent, je me demande comment j’ai pu mettre si longtemps pour comprendre la vérité. Ma mère et le vétérinaire m’avaient juste raconté un énorme bobard et avaient remplacé mon hamster, sûrement déjà mort alors, par un lapin nain. Je pourrais leur en vouloir mais, même si je me suis souvent battu pour faire comprendre aux autres que c’était un hamster et pas autres choses, je trouve ça vraiment magique qu’ils aient mis en scène tout ça juste pour m’empêcher de souffrir.