Category: Nouvelles

  • 086 – Dix, onze, douze

    Phrase donnée par Polgara d’Erat

    « 1, 2, 3, nous irons au bois. 4, 5, 6 planter des saucisses.

    — 7,8,9 et s’taper des meufs.

    L’escouade s’esclaffa à l’arrière du blindé. L’habitude était de décompresser un maximum pendant le trajet de la mission. Personne ne savait ce qu’il y aurait après, alors autant en profiter. Pour celle-ci, la présence du petit nouveau faisait que le niveau de grivoiserie et de lourdeur de l’humour atteignait des sommets. L’habitude était de voir quelle était la limite d’outrage des bleus.

    Le première classe Hersnivia venait d’être affecté à l’escouade 201. Il n’avait que dix-neuf ans et un physique un peu moins étoffé que ses nouveaux camarades mais il avait passé tous les tests sportifs et psychomoteurs avec d’excellents résultats possibles. Évidemment, il n’avait pas fini premier au classement général mais les quelques autres qui l’avaient précédé n’avait pas osé choisir cette affectation renommée, prestigieuse mais contraignante.

    L’escouade 201 avait pris part aux missions les plus importantes des dernières guerres sur le territoire national et sur de très nombreux théâtres d’opérations à l’étranger. Les légendes urbaines disaient même qu’elle aurait été à l’origine d’un certain nombre de changement de chefs d’État dans les anciennes colonies. Mais les méthodes souvent discutables, parfois répréhensibles au regard du droit international, de l’équipe empêchaient les gouvernements successifs de confirmer ou non l’information.

    Hersnivia avait pris le poste de tireur d’élite. Personne ne voulait parler de la façon dont le précédent était mort. La seule chose de sûre était qu’il n’avait pas pris la quille. La jeune recrue essayait de ne pas trop se poser de question et de ne pas trop en poser. Il avait essayé une fois et s’était fait plus ou moins gentiment rembarrer par le sergent Martins.

    Alors qu’une blague de mauvais goût, mélangeant étrangement l’âge d’Hersnivia, du lait qui coulerait encore de son nez, une chèvre et une cuillère en bois et le ceinturon du capitain, venait encore de fuser, le véhicule arrêta de bringuebaler dans un freinage brutal comme les aimait le caporal Lefèvre.

    Martins se retourna vers son groupe.

    « Ok les gars ! Vous connaissez la mission et vos positions ! Pas de questions ?

    Silence.

    — Le nouveau ?

    — Non, sergent ! Pas de question ! répondit Hersnivia en serrant un peu plus son fusil et soutenant le regard de son supérieur.

    — Bien ! Alors, te fait pas dessouder pour ta première mission ! J’ai pas envie d’annoncer à ta mère que tu t’es fait bouffer le cul par l’ennemi ! Allez ! Débarquez !! »

    La porte arrière du blindée s’ouvrit. Le groupe sortit rapidement pendant que le conducteur, après s’être allumé un cigare, s’installait à la tourelle et commençait déjà à envoyer du tir de couverture.

    Hersnivia inspira profondément. Il y était. Sa première mission, ce pour quoi il avait accepté de souffrir pendant ces quatre mois de classes. Il entendait distinctement le bruit de mitrailleuses et de tirs d’artillerie ennemi. Tous autant qu’ils étaient, ils risquaient de mourir aujourd’hui, ou demain ou pour n’importe quelle mission. Cette idée lui donna la sensation d’être plus en vie que jamais. C’était pour ça qu’il s’était engagé.

    Le première classe sauta à son tour du véhicule. Le sergent lui mit un coup sur le casque.

    « Ça y est ? T’as fini de te pisser dessus ?

    Le tireur d’élite hocha la tête, souriant béatement et le regard dans le vide, concentré sur sa mission, il répondit évasivement au chef de groupe :

    — 10, 11, 12 fêter la victoire devant une binouze ! »

    Le groupe se sépara pour accomplir, encore une fois, sa mission.

  • 085 – Trinlandia

    Phrase donnée par Ambrose

    « Sers-toi, j’en ai plus besoin de toute façon.

    Fligorn avait dit ça à son neveu comme s’il parlait d’un pot à lait ou d’un râteau à feuilles mortes.

    — Sérieusement ? Tu ne te sers plus de Trinlandia, la tueuse de dragons ? demanda encore Wilhmir, ébahi par la proposition.

    — Ben, j’en tue plus beaucoup, à vrai dire, depuis que je suis à la retraite.

    Le jeune homme haussa les épaules et décrocha l’épée légendaire du mur. Il fut tout d’abord surpris par son poids et ne put étouffer un soupir de stupéfaction.

    — Ah ! Oui ! reprit Fligorn. C’est pas une arme de mage. Il faut avoir un peu d’expérience et de force pour s’en servir. »

    Mais déjà, Wilhmir s’amusait à faire tournoyer la lame en tous sens pour mesurer sa facilité d’utilisation. D’aussi loin qu’il puisse se souvenir, il avait vu cette épée posée contre le mur dans la maison de son oncle. Et pour le faire s’endormir, sa mère lui racontait les histoires des aventures du légendaire Fligorn, le plus grand tueur de dragons.

    Wilhmir avait toujours rêvé de le suivre dans ce métier dangereux mais apportant la renommée et la fortune. Fligorn avait toujours été son exemple à suivre même s’il n’avait jamais osé en parler à ses parents pour ne pas les inquiéter. Malgré sa fougue et son inconscience, le jeune homme savait que c’était un métier dangereux.

    Wilhmir déposa délicatement l’épée sur un meuble et donna une accolade à Fligorn.

    — Mon oncle, je te remercie énormément pour ce cadeau !

    — Va t’amuser avec et dis-moi ce que tu en penses. Elle devrait te faire gagner par mal de niveau » termina le héro.

    Wilhmir reprit Trinlandia avec délicatesse et partit, la jubilation peinte sur son visage.

    « J’aurais peut-être dû lui dire qu’elle a un malus contre les orcs… pensa Fligorn, puis haussant les épaules : Bah ! Il s’en rendra bien compte tout seul, ça fera parti de sa formation. »

  • 084 – Grimaldo

    Phrase donnée par Luigi B.-B.

    L’homme tapait en vain dans ses mains pour chasser les moustiques.

    Sur sa mule, il avançait lentement. Il transpirait même dans la chaleur de la nuit. Ce désert était un endroit qu’il détestait mais il était obligé de passer par là.

    Dans le ciel dégageait, Jupiter prenait une grande partie du champ de vision. C’était toujours un spectacle magique à ses yeux.

    Il psalmodiait à voix basse, lâchant quelques jurons contre ses insectes, créations du démon.

    Le père Grimaldo était un gros bonhomme qui aimait la bonne chère et le bon vin.

    À cet instant, il se demandait pourquoi il avait accepté cette mission de l’archevêché intergalactique. Même si la vie dans ce pénitencier de Callisto n’était pas des plus mauvaises pour lui, il ne supportait pas le voyage du spacioport jusque-là. À part les convois de prisonniers, aucun transport ne desservait la prison. Elle était complétement autonome en nourriture, eau et énergie. Évidemment, il était très content de revoir son ami, Lord Prentwood, le seigneur-directeur du pénitencier. Il s’étonnait d’ailleurs que celui-ci ne lui ait pas répondu à son annonce de visite et qu’il n’ait pas fait envoyer une navette pour le chercher.

    Ce qui expliquait qu’il se trouvait à présent en plein désert, sur cette mule jupitérienne, à maudire ces moustiques.

    Il n’avait pas vraiment de raison de s’inquiéter, les tempêtes galactiques causaient parfois des interférences dans la délivrance des messages.

    Le curé voyait enfin la fortification du pénitencier. Il arriverait d’ici deux heures et se délectait déjà du vin que lui servirait son ami. Pas qu’il n’avait rien à faire de l’âme des pauvres pêcheurs qui peuplaient la prison mais son propre bien-être l’importait plus encore.

    Finalement, il sonna à la porte gigantesque du pénitencier et fut mené au bureau du directeur.

    En lieu et place de Lord Prentwood, le père Grimaldo découvrit un jeune homme sec au regard dur.

    « Je suis Lord Kevinsky, le nouveau seigneur-directeur du pénitencier. Lord Prentwood fait désormais parti des détenus après avoir détourné les fonds de la structure pour ses fins personnelles. Je ne sais pas comment il vous recevait, mais, pour ma part, je suivrai les recommandations de l’archevêché intergalactique : repas simple, pas de boisson autre que de l’eau, et vie en cellule avec les détenus pour être au plus près de ces malheureux.

    Le père Grimaldo pâlit. Il avait l’impression d’être tombé dans un piège de sa hiérarchie.

    — Et vous ne repartirez qu’une fois votre relevant arrivé. »

    Il en était à présent certain.

  • 083 – L’horloge

    Phrase donnée par Ambrose

    L’horloge s’arrêta.

    Marie sentit la migraine monter. Elle regarda l’horloge encore quelques secondes pour être sûre. Rien ne bougeait plus. Plus aucun son ne se dégageait ni de l’objet ni des alentours.

    Il était temps d’agir. Elle n’avait pas longtemps avant que le temps ne reprenne son cours. L’Inhibiteur qu’avait fabriqué l’ingénieur en chef Sanboussy ne devait agir que vingt cinq minutes. Ensuite, tout reprendrait comme si de rien n’était. En attendant, il ne lui restait plus que vingt quatre minutes et quarante sept secondes pour accomplir sa mission.

    Marie était agent secret ; la plus rapide et la plus capable de résister aux effets des distorsions du temps. Mais cette fois, ça n’était pas juste un simple ralentissement, c’était une pause complète. Les douleurs psychiques que les truchements du temps entraînaient sur les agents étaient impressionnantes mais l’arrêt complet, c’était Waterloo dans la tête de Marie. Elle s’attendait à quelque chose du genre mais rien d’aussi fort.

    Elle allait avoir du mal à tenir le décompte du temps restant mais il fallait qu’elle avance.

    La mission était simple dans son but, moins dans sa réalisation. Elle devait assassiner un président. Le président Navarrais. Il fallait faire passer cela pour un attentat de ses opposants. La Reine avait des vues sur ce petit pays et en couper la tête tout en faisant accuser l’opposition l’aiderait à mettre la main dessus.

    Marie sortit de la calèche électrique et se précipita dans l’hôtel, faisant bien attention à ne bousculer personne pendant la suspension. Il fallait éviter un maximum les interactions avec les êtres vivants pendant ces périodes. Évidemment, il était impossible d’utiliser les ascenseurs. Marie dut prendre les escaliers. Avec son mal de crâne, ça n’allait pas être de tout repos. Trente-cinq étages…

    Ça serait la partie la plus difficile.

    Essoufflée, au bord de la folie avec cet étau qui lui enserrait la tête, elle parvint en haut de l’immeuble avec encore dix minutes trente environ. Le décompte était approximatif.

    Il ne fut pas compliqué pour elle de trouver la suite du président Cathare. Tout en serrant bien l’Inhibiteur de temps pour qu’il continue à agir, Marie sortit de sa poche la grenade navarraise pui ouvrit la porte de la suite.

    Tout le monde était debout sauf le président, assis derrière un bureau. Il écrivait une lettre. Marie prit un instant pour lire ce qui pouvait constituer une source de renseignements. Elle fut plus qu’étonnée de voir que le président Navarrais s’attendait à un attentat et accusait directement la Reine. Comment pouvait-il le savoir ? Marie attrapa la feuille et la tira d’un coup sec. Le stylographe du Président laissa un grand trait sur le papier.

    La jeune femme allait poser sa grenada au milieu du bureau quand son esprit vit quelque chose bouger dans un coin de son regard. Elle réagit plus vite que sa conscience et d’un bond esquiva un tir.

    Criant un juron en se plaquant au sol, elle eut à peine le temps de voir qu’un des agents navarrais bougeait.

    C’était impossible ! Ils n’étaient pas sensés avoir cette technologie. Ce n’était pas vraiment le moment de réfléchir au comment du pourquoi. Elle devait le neutraliser et laisser la grenade rapidement si elle ne voulait pas avoir des problèmes à s’extraire de l’hôtel après l’explosion et la reprise du temps.

    Le gars tira encore une salve de trois coups. Marie jeta un coup d’œil rapide pendant qu’elle changeait d’abri. D’après le modèle de pistolet, il ne lui restait plus que deux coups, voire moins. Après, elle pourrait s’attaquer à lui au corps à corps. Elle roula de derrière son divan en direction du bureau du président. L’agent dans un réflexe idiot tira ses deux derniers coups en suivant sa cible, oubliant le reste. Le président eut un sursaut et un tremblement étrange avant de reprendre la pose figée.

    Marie jubilait. Elle n’aurait même pas besoin de sa grenade. Elle sauta par-dessus le bureau et profita de la seconde d’étonnement de l’agent pour lui mettre un grand coup dans le visage avec la grenade qu’elle avait encore en main. Il tomba au sol, sonné, tant pas son acte que par le coup.

    Même si la mission était remplie, Marie ne pouvait partir sans s’occuper de cet homme qui ne devait absolument pas parler d’elle. Elle inséra la grenade dans la bouche de l’agent et tira la goupille.

    Le lendemain, on lirait dans les journaux qu’un des agents du président Navarrais l’avait tué par balle avant de mettre fin à ses jours.

    Marie ne savait plus vraiment combien de temps il lui restait. Elle devait faire vite. Elle dévala les escaliers aussi vite qu’elle put.

    La jeune femme arrivait dans le hall de l’hôtel quand l’Inhibiteur eut un soubresaut étrange. Les gens, arrêtés dans leurs mouvements, reprirent vie d’un coup, comme si rien ne s’était passé. Ce qui était vrai pour eux.

    Il ne restait plus que le temps à Marie du retard d’allumage de la grenade pour sortir de l’hôtel et être récupérée par la calèche. Le groom la salua comme elle sortit. L’explosion retentit à cet instant. Les vitres de la suite présidentielle volèrent et tombèrent en pluie une seconde plus tard. Le groom se mit à l’abri sous l’auvent de l’hôtel cherchant la jeune femme qui venait de sortir pour la mettre elle aussi à l’abri. Elle avait disparu.

    Une calèche partit tranquillement vers l’esplanade des Victoires.

  • 082 – La veuve

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Khyreena

    Je ne veux pas me faire tuer par une femme dont les chaussures ont coûté plus cher que ma voiture. J’ai peu de principes mais j’ai au moins celui-là.

    En attendant, je marche, une pelle à la main, un flingue plaqué dans le dos, en direction de la tombe de mon patron.

    Cette conne qui marche sur la pelouse avec ses talons aiguilles à cinquante mille, c’est sa veuve éplorée. Je sens au mouvement du canon dans mon dos qu’elle a une certaine tendance à s’enfoncer dans le sol humide.

    « Attention à pas me tuer par inadvertance, en plantant vos chaussures.

    — Ta gueule ! Avance ! » répond-elle sèchement.

    Je serre les dents, et même si mon métier interdit généralement de s’attaquer aux femmes et aux enfants, je me ferais un plaisir de m’en occuper.

    Je suis quasi sûr qu’une fois l’arme retournée contre elle, la belle veuve tentera la carte de la séduction pour essayer de reprendre la main. C’est vrai qu’elle est admirablement bien taillée. À quarante-cinq ans, elle rivalise facilement avec des nanas de vingt-cinq. Mais je ne me ferai pas avoir. Je sais ce dont elle est capable. J’ai vu ce qu’elle a réussi à faire à la première femme du patron.

    Arrivé devant la tombe du boss, je m’arrête.

    « Allez ! Creuse ! m’ordonne-t-elle.

    J’hésite un instant, me demandant si je dois faire ce qu’elle me dit ou me retourner et lui mettre un grand coup de pelle dans sa belle petite gueule. Finalement, je fais demi-tour et me plaque contre le canon en la regardant droit dans les yeux. Avec ses maudits talons, elle est presque aussi grande que moi.

    — Et si j’veux pas ? Ça va vous avancer à quoi de m’butter ? C’est vous qu’allez creuser ? Mmh ?

    Elle hésite. Je le vois dans son regard. C’est pas tout de tenir une arme, il faut être vraiment prêt à s’en servir et être sûr que ça apporte quelque chose. Là, c’est pas trop le cas.

    — Et puis, vous lui voulez quoi à votre défunt mari ? Il vous a pas laissé assez ?

    Je la vois se ressaisir, elle lève le pistolet pour le mettre entre mes yeux.

    — Pose pas de questions. Creuse ! »

    Alors je creuse. J’aurais déjà pu la désarmer et lui faire passer l’envie de jouer à la méchante avec moi mais je suis curieux de nature. C’est mon seul défaut. Le boss me disait que ça causerait ma perte.

    Au bout d’un moment, ma pelle heurte le cercueil.

    Au fond de mon trou, je vois ses pompes à vingt cinq mille, sa jolie jambe qui dépasse de sa robe fendue, ses courbes appétissantes et surtout son sourire. Elle est ravie d’arriver au but.

    « Alors ? Je cherche quoi ?

    Elle fronce les sourcils, se sentant bien obligé de me mettre dans la confidence.

    — Des bons au porteur. Pour quatre-vingts millions.

    J’écarquille les yeux, vraiment surpris par cette nouvelle. Je ne m’attendais pas à ça.

    — Allez ! Dépêche ! On n’a pas toute la nuit !

    Effectivement. Je sens déjà au loin le ciel commencer à changer de teinte.

    Au bout d’une demi-heure, voilà le cercueil prêt à être ouvert. Je me retourne vers elle. D’un mouvement de menton, elle me fait comprendre d’y aller. Avec le tranchant de la pelle, je vais sauter les verrous de la boîte. Le patron y est tranquillement installé. On dirait qu’il dort. Ça me fait presque plaisir de le revoir. Alors que je commence à le fouiller, je n’arrive pas à refreiner un « désolé, boss ! ». Il n’a rien sur lui. Je suis obligé de le sortir pour tester la doublure. Bingo ! Je sens les bons.

    Alors que je plonge la main dans ma poche pour en tirer mon couteau, Madame se tend et s’apprête à faire feu.

    « Tout doux, je sors ma lame pour la doublure ! dis-je en gardant la main dans la poche.

    — Fais pas le con, je t’ai à l’œil ! »

    Les bons sont tous là, il y en a un bon paquet. La veuve me jette une sacoche. Pas besoin de m’expliquer. Je range le tout à l’intérieur.

    Du fond de mon trou, je lui tends l’attaché-case. Elle est obligée de se baisser un peu pour l’atteindre. Elle plie les genoux, dévoilant un peu plus sa jambe nue.

    Cette garce ne me donnerait même pas quelques bons pour le service. Hors de questions qu’elle s’en sorte comme ça.

    Alors qu’elle attrape la sacoche, je tire de toutes mes forces. Elle tombe et tire en même temps. J’ai la tempe en feu. Je crois qu’elle m’a atteint à l’oreille. Pas le temps de vérifier. Elle est face contre terre et se débat au fond du trou pour se redresser. Mon couteau toujours en main, je pose un genou entre ses omoplates et lui attrape sa belle tignasse. Ramenant sa tête en arrière, je l’embrasse dans le cou et lui susurre :

    « T’as pas choisi le bon larbin pour jouer, salope ! »

    D’un coup rapide, je lui tranche la gorge. Au moins le boss reposera avec sa pute.

    Je récupère la sacoche pleine de bons et sors du trou.

    Soudain, je sens une douleur me traverser la poitrine. Un bruit de coup de feu. Je me retourne lentement et la voit lâcher le  flingue dans un dernier soupir.

    Pendant que je pousse le mien en tombant à mon tour dans le trou, je vois les bons tombés de l’attaché-case s’envoler dans le cimetière.

    Je m’écrase devant ces putains de talons aiguilles.

  • 081 – Le désert

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Amelodine

    Si j’avais fait la révision de ma voiture, peut-être que je ne serais pas là, coincé dans ce désert, avec une chance de survie des plus moindres.

    Je serais au bord de la piscine de l’hôtel à siroter un bon mojito en train de mater les nanas en maillot de bain, en attendant juste que Christen arrive, avant de nous envoyer en l’air pendant des heures dans notre chambre climatisée.

    Et là, je suis en train de marcher en espérant trouver une hypothétique station service et une dépanneuse. Si au moins le moteur avait continué de tourner, j’aurais pu rester dans l’habitacle de ma bagnole avec la clim’ à fond.

    Je ne suis même pas sûr qu’il y a une station à une distance humainement atteignable. La chaleur fait danser le décor. Je n’ose pas enlever ma veste de peur de cuire littéralement mais je transpire à fond. Quelle horreur ce désert. Si Dieu existe, il faudra qu’il m’explique pourquoi il a créé ça. Et les moustiques aussi. De la saloperie ces trucs.

    Et puis le téléphone portable qui ne passe pas. Absolument pas de réseau. À se demander pourquoi on paye aussi cher pour un service aussi merdique. C’est quand même plus facile en plein milieu de Manhattan de trouver une ligne fixe pour les appels d’urgence, par contre, en plein désert, non, c’est pas la peine d’espérer, puisqu’il n’y a pas de réseau. Fait chier.

    Je crois que la soif commence à me rendre vulgaire.

    Et aucune voiture qui passe. C’est vraiment mon jour de malchance, aujourd’hui. Manquerait plus que je tombe sur un cimetière indien hanté ou le site de crash d’une soucoupe volante extra-terrestre et j’aurais tout gagné. Me faire courser par un puma ou un coyote. Je ne sais pas, mais je commence à devenir dingue sous cette cagna.

    Je ne sais même pas comment j’arrive encore à marcher, comment mes jambes me portent encore. J’ai l’impression que si je tombe, je n’aurais pas la force de me relever. Je préférerais me laisser mourir sur place. Je ne sais même pas pourquoi je continue en fait, je commence vraiment à me dire que je vais mourir ici et donner à manger aux vautours et autres habitants de ce désert.

    Au bout d’un temps qui me paraît une éternité, j’entends le ronronnement d’un moteur. Au loin venant de là où je suis en panne, je vois un camion. Mon sauveur. S’il s’arrête.

    Finalement, il arrive sur moi. Grâce à mes grands signes et sûrement aussi à ma tronche tannée par le soleil.

    À l’intérieur, je vois le conducteur qui me demande ce qu’il se passe. Je lui explique en montant avec difficulté dans la cabine. Le gars m’explique la prochaine station service est à environ quatre-vingt miles de là. Il m’y dépose sans problème. Je ne sais pas pourquoi Dieu à créé les déserts mais à cet instant, je le remercie d’avoir créé les routiers.

    Il me propose à boire, j’accepte avec plaisir. Ma gorge est tellement sèche… Rapidement, je m’endors, bercé par le mouvement tranquille de la cabine et harassé par la chaleur et la fatigue.

  • 080 – La goutte

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Polgara d’Erat

    David regarda la goutte de sang couler le long du mur.

    Il en avait vu des centaines déjà. Des petites disséminées sur le sol. De grandes raies des murs comme quand on égoutte un pinceau. Des amas en quantité tellement grandes qu’on est toujours étonné que ce ne soit le sang que d’une seule personne…

    En étant policiers, David avait pu voir des choses bien plus horribles que cette goutte de sang. Son métier avait tout ce qu’il fallait pour retourner les tripes à n’importe quelle heure du jour et de la nuit, et plus particulièrement depuis que le « tueur de flics », comme l’appelait la presse, avait commencé ses meurtres depuis six mois. Douze de ses collègues y étaient passés, et dans le lot, deux amis très proches de David. Et les mises en scènes étaient vraiment monstrueuses.

    Tout le monde était tendu à la brigade. On sortait moins de nuit, jamais seul. La paranoïa les guettait tous. Évidemment les civils se sentaient un peu concernés et ne paniquaient pas ayant bien compris que seuls les policiers étaient atteints par ces attaques sournoises.

    David était comme tous les autres, sur les nerfs. Mais ce soir, il y avait eu un appel pour des coups de feu entendus dans un quartier en général assez calme. Il avait été envoyé ici pour vérifier avec Paul, co-équipier habituel.

    Ils avaient vérifié une première fois le quartier en faisant une ronde rapide en véhicule puis étaient descendu pour la refaire à pied. Arrivé près d’une impasse, David voulait vérifier au bout. Paul avait insisté pour laisser tomber, cette alerte ressemblant plus à un canular qu’autre chose. David, sans écouter son collègue, s’était engouffré dans l’impasse sombre, la lampe torche dans une main, le pistolet dans l’autre.

    Une fois au bout, à présent sûr qu’il n’y avait rien de suspect, il allait retourner à la voiture quand il vit cette goutte sur le mur. Puis une salve de sang y apparut, puis une seconde et encore une autre. Au rythme de son cœur. David mit un instant pour sentir la douleur dans son cou. Le temps qu’il y porte la main, sa vision se troublait déjà. Il se retourna pour voir son collègue avec un sourire sadique et un couteau de chasse ensanglanté dans la main.

    « Je t’avais dit de pas venir au fond. Mais comme d’hab, tu n’en fais qu’à ta tête. Voilà où ça mène de vouloir jouer les superflics ! Par contre, j’aurais cru qu’avec toi ça serait un peu plus compliqué qu’avec les autres ! Je suis désolé mais j’aurai pas le temps de te faire une mise en valeur, j’ai une couverture à tenir ! »

    David, toujours dans l’incompréhension la plus totale, s’étala au sol, incapable de contrôler plus ses jambes. Il se sentait fatigué. Avant que ses yeux ne se ferment malgré ses efforts, il eut le temps de voir Paul mettre la main à sa radio.

    « P.C. on a un homme à terre… »

    David aurait voulu lui lancer une insulte mais il n’en avait plus la force. Il ne sentit pas sa tête taper le sol quand ses yeux se fermèrent définitivement.

  • 079 – Contaminée

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Saghey

    Je suis sortie sans parapluie. J’aurais dû me méfier. C’est le moment où ils ont décidé d’attaquer. Maintenant me voilà contaminée. Pour le moment, j’ai le contrôle de mon corps mais jusqu’à quand ?

    Personne ne sait vraiment comment la contamination est apparue. Il paraît que c’est aussi vieux que le monde.

    J’avais déjà réussi à me défendre contre certains mais cette fois, je ne sais pas pourquoi j’ai oublié mon parapluie mais c’est forcément à ce moment qu’ils ont décidé d’attaquer. Sans moyen de défense, je ne pouvais rien faire.

    Il paraît que les premiers symptômes apparaissent très rapidement. On se sent mal et on vomit tripes et boyaux. J’ai entendu dire qu’on se réveillait un matin et qu’on découvrait les symptômes. Les gens n’étaient plus jamais être eux-mêmes.

    Je n’ai pas envie de perdre la tête ni de voir mon corps souffrir de cette maladie. J’ai peur.

    Je ne sais pas ce que vont devenir mes amies. Il faudra que je les évite à présent. Pour ne pas les contaminer non plus. J’espère qu’il n’est pas déjà trop tard. Le bon côté des choses c’est que je pourrai en revoir d’autres que je n’ai pas vus depuis longtemps.

    Assise sur le rebord de la baignoire, accoudé au lavabo, me tenant la tête. Je fixe le test me le confirmant.

    Je suis enceinte.

  • 078 – Le hamster

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrase donnée par Julien V.

    « Madame, j’ai le regret de vous dire que votre Hamster est schizophrène.

    La nouvelle lourde de sens avait fait tomber le silence dans la pièce. J’avais regardé ma mère avec un regard d’incompréhension pendant que celle-ci, fixant le vétérinaire, avait essayé d’assimiler l’information. Dans un réflexe tout maternel, elle me serait contre elle en me caressant les cheveux. Au bout d’un instant, elle se hasarda à demander :

    — Ça se soigne ?

    La physionomie du docteur avait changé à plusieurs reprises mais pour chaque fois prendre une expression gênée ou confuse.

    — Écoutez, madame, à ce stade, nous ne sommes pas très avancés pour ce genre de problèmes mais il y a des rayons, des traitements expérimentaux… »

    Ma mère avait souri. Moi, je ne comprenais absolument pas ce que racontaient ces adultes. Je voulais juste que Pico, mon Hamster aille mieux. Cela faisait des jours qu’il passait d’un état où il ne mangeait plus rien à un état où il mangeait trois fois son poids. Des fois, il était très affectueux et parfois très agressif, au point de mordre tout le monde. Et depuis la veille, il ne faisait plus que dormir. Ça m’inquiétait beaucoup. J’aimais énormément ce hamster. J’avais tanné ma mère pour aller le faire soigné. Au début, elle n’avait pas l’air très d’accord et finalement, elle avait cédé.

    Le vétérinaire s’était levé pour faire le tour de son bureau et s’agenouiller à ma hauteur.

    « Pico est très malade. Il peut continuer à vivre encore longtemps, mais il souffre et risque d’être dangereux pour lui comme pour toi ou ta famille. Tu comprends ?

    J’avais secoué la tête pour répondre que oui, même si je n’arrivais pas à comprendre comment Pico pourrait être dangereux.

    — J’ai un moyen de le guérir mais il y a des effets étranges parfois. Si Pico redeviendra très gentil, il y a des risques qu’il ait du mal à te reconnaître et il va peut-être changer un peu aussi, comme grossir ou avoir les poils qui poussent.

    J’avais encore une fois secoué la tête, pas vraiment sûr de comprendre mais je savais que je voulais sauver mon ami.

    — Tu acceptes qu’on essaie le traitement sur Pico ?

    — Oui, docteur, sauvez-le ! » avais-je simplement dit.

    Je me souviens de ma mère poussant un long soupir de soulagement. Nous étions retournés en salle d’attente. Ça avait duré des heures. Et finalement, le vétérinaire nous avait rappelé. Il souriait en grand. Après nous avoir invités à nous asseoir, il croisa les mains, posé sur son bureau, comme il avait l’habitude de le faire, et prit une inspiration. Il parla en me regardant.

    « La thérapie s’est bien passée. En revanche, il y a bien eut des effets un peu indésirables sur Pico. Comme je t’avais prévenu, il a pris du poids, ses poils son plus longs, ainsi que ses oreilles, mais le plus important est qu’il est guéri ! »

    Il se leva pour aller chercher dans la pièce de derrière notre cage et Pico à l’intérieur. Effectivement, il avait un peu changé mais alors, je m’en fichais complétement. J’étais juste heureux de le retrouver en pleine forme.

    Finalement, Pico a vécu longtemps, beaucoup plus d’années qu’un hamster classique. Mais à présent, je me demande comment j’ai pu mettre si longtemps pour comprendre la vérité. Ma mère et le vétérinaire m’avaient juste raconté un énorme bobard et avaient remplacé mon hamster, sûrement déjà mort alors, par un lapin nain. Je pourrais leur en vouloir mais, même si je me suis souvent battu pour faire comprendre aux autres que c’était un hamster et pas autres choses, je trouve ça vraiment magique qu’ils aient mis en scène tout ça juste pour m’empêcher de souffrir.

  • 077 – Carmen

    <Message de service> À partir de maintenant, je mettrai en italique la ou les phrases données. </Message de service>

    Phrases données par Polgara d’Erat

    Carmen posa le torchon sur la barre de son four, se retourna, et fixa son mari droit dans les yeux.

    « Carl, y-a-t-il quelque chose que je devrais savoir ?

    Le quadragénaire, surpris, se retourna pour voir s’il n’y avait pas quelqu’un derrière lui, véritable destinataire de cette question. Mais il n’y avait personne. Il avait bien eu l’idée de lui répondre « conduire » mais vu la façon dont la question avait été posée, Carl comprenait que ce n’était pas le moment de rire.

    — Sur quoi ? se hasarda-t-il finalement à demander. Carmen refréna un sourire de nervosité

    — Tu sais très bien de quoi je parle !

    — Je… euh… ben… euh… Non, en fait.

    Carmen attrapa un couteau de cuisine sur le support en bois. La lame eut l’air de scintiller étrangement dans le regard de Carl. Il déglutit, heureux de n’avoir pas fait sa blague.

    — Tu sais qu’il ne faut pas me prendre pour une conne, je n’aime pas ça ! continua-t-elle en allant au frigo dont elle tira un poulet.

    — Mais, ma chérie, tu veux savoir quoi sur quoi ? Je ne comprends pas.

    Elle posa le poulet sur une planche à découper et enfonça la lame de son couteau, tout en continuant de fixer son mari dans les yeux. Elle ne l’avait lâché du regard que pour trouver, rapidement, la volaille dans le frigo.

    — Tu crois que je n’ai pas vu ton manège ? Tu passes ton temps sur ton portable à envoyer et recevoir plein de message. Si tu as une maîtresse, dit le moi ! Ça serait pas très classe de m’annoncer ça le jour de mon anniversaire mais à quoi bon attendre demain ?

    — Oh putain ! Ton anniversaire ! J’allais complétement oublier !

    Le visage de Carmen eut l’air de se détendre quand elle vit son mari fourrer la main dans sa poche. Il n’avait pas oublié et allait sûrement sortir un écrin contenant une bague. Il était adorable finalement.

    Mais au lieu de ça, il tira son téléphone et lança un appel. Carl, l’index sur la bouche intima l’ordre à sa femme de se taire.

    — J’ai oublié d’appeler le garagiste pour le contrôle technique de la bagnole, annonça-t-il pour toute excuse avant de s’éloigner dans le salon.

    Carmen sentit le sol s’ouvrir sous ses pieds. Alors qu’à l’autre bout du téléphone, elle entendait vaguement sonner, Carl se retourna et lui sourit gentiment, comme si tout allait bien. Carmen eu l’impression de perdre la raison. Carl n’eut que le temps de commencer sa phrase à son interlocuteur qu’il se mit à hurler de douleur du couteau que sa femme venait de lui planter dans le dos. Une fois. Deux fois. Trois fois. Plein de fois.

    Des années de frustrations sortaient de Carmen. Quand elle s’arrêta, elle était recouverte du sang de son mari qui gisait sur le sol du salon. Quand elle releva les yeux, repoussant une mèche de cheveux, elle découvrit tous ses amis qui venaient d’entrer dans la maison. Certains avaient des paquets cadeaux, d’autres des bouteilles de champagne ou de vin mais tous avaient les yeux écarquillés rivés sur leur amie.

    La main de Carmen lâcha l’arme du crime comprenant la vérité et essayant de se persuader qu’elle venait de rêver les cinq minutes précédentes. En même temps que l’impact du couteau brisa le silence. Carmen s’évanouit.